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Mars Express

mercredi 22 novembre 2023

C’est assez rare que j’aille à une séance de 13h le mercredi après-midi. Mais ce dessin-animé réalisé par la même équipe que “The Last Man” (à voir sur TV slash), me titillait depuis 5 ou 6 mois quand j’avais entendu parler de sa sortie.

Il y a de cela 3 ans environ, ils ont ressorti le magazine Metal hurlant, ce vieux fanzine qui a inspiré tant de créateurs de bd et de fans de S.F. en tout genre. Metal Hurlant c’était Moebius, Enki Bilal, Druillet, Mandryka… Tout cela a créé un imaginaire, une référence, une culture commune de “vieux”.

Avec Mars Express, Jérémie Périn et Laurent Sarfati remettent au goût du jour cet imaginaire. Nous sommes dans un film de pur S.F., on ne situe pas l’année, on s’en fout. C’est dans le futur. Le nombre de trouvailles tout au long du film sur l’univers qu’ils ont créé est formidable, mais ce n’est pas le coeur de leur film. Non. Ils ne perdent pas le fil. Il s’agit d’un polar. Une enquête. Une série noire. Il y a du meurtre, des complots, des méchants, des flics.

Quand on prend, par exemple, un très beau film récent de S.F. comme The Creator, tout le monde a salué la maestria du réalisateur, la beauté des effets spéciaux… Mais tout en reconnaissant que l’histoire était un peu légère, pas très aboutie…

Ici rien de tout cela. Les auteurs ont créé un magnifique écrin, sans délaisser ni leur personnage, ni leur intrigue. Ca dure 1h25, c’est tendu, efficace, très bien ficelé et bluffant.

Les musiques sont sublimes, les personnages très bien incarnés grâce à une magnifique animation et un doublage parfait.

Ca fait vraiment plaisir de voir une aussi belle réussite dans ce domaine, comme si, à nouveau, la S.F. française pouvait briller au firmament et devenir source d’inspiration. Ce qui a souvent été le cas : Jules Verne, René Barjavel, Pierre Boulle, Pierre Bordage, Jean-Pierre Andrevon, Moebius, Druillet, Alain Damasio, Bernard Werber

Sans oublier que la S.F., ce n’est pas que des extra-terrestres, c’est avant tout un moyen détourné de parler de notre époque et de notre humanité. C’est le défi relevé haut la main par ce magnifique film d’animation.

A.R. le 23/11/2023

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Rime en Vrac

Karl

A Karl Tremblay

Un bon cowboy est un cowboy fringant

Un mauvais cowboy c’est un cowboy fringant mort.

Je connaissais un Karl il y a longtemps.

On était ami.

On faisait du théâtre ensemble.

C’était beau.

Avec d’autres copains.

Karl était…

Karl est une force de la nature.

Il est grand.

Il est costaud.

Il inspire le respect.

Mais en plus il est gentil.

Il inspire l’amitié.

Le seul défaut de mon Karl

C’est que ce n’était pas un cowboy.

Et non,

Je n’ai pas connu Karl le cowboy.

Et pourtant je suis triste.

Vraiment

Je n’ai pas connu Karl le cowboy

Mais je l’ai écouté…

Je l’écoute chanter…

Souvent.

J’ai vu des photos

J’ai vu des vidéos.

Il était grand.

Il était costaud.

On avait le sentiment d’un bloc, 

Sur lequel se reposer.

Il aimait ses ami.e.s.

Ses ami.e.s l’aimaient.

Il avait tellement d’ami.e.s…

Il semblait gentil.

Karl.

Ca doit être comme ça

Quand on s’appelle Karl.

On est costaud,

On inspire la confiance,

On est gentil

Et les gens nous aiment.

Cette semaine j’ai perdu

Karl.

Karl le cowboy.

Karl le cowboy fringant.

Car un bon Karl est un Karl fringant.

Et comme mon ami Karl

Le cowboy fringant s’appelait Karl

C’est sans doute pour ça

Que sans l’avoir connu,

Sans même l’avoir vu en vrai…

J’ai l’impression d’avoir perdu un ami.

Et finalement je me dis

Que ce n’est pas qu’une impression : 

J’ai perdu un ami.

A.R. le 17/11/23

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Rime en Vrac

Dommage

Je n’en peux plus 

des politiciens

Je n’en peux plus

des décisionnaires

des actionnaires

Je n’en peux plus

des gens qui votent à droite

Je n’en peux plus

des FN RN pro haine

Je n’en peux plus

des gens qui croient n’importe quoi

je n’en peux plus

de ces 1% les plus riches

Je n’en peux plus 

De ceux qui sont “contre”

le vélo

les migrants

les homos

le progrès social

l’écologie

les pauvres

l’écriture inclusive

Je n’en peux plus

de ces gens qui déversent leur haine

à la télé

sur internet

sur les réseaux sociaux

Je n’en peux plus

de la colère

Je n’en peux plus

des gens qui n’entendent pas

les cris sourds du pays

Je n’en peux plus

de ce pognon de dingue

Je me demande…

parfois…

Si le projet d’Elon Musk

Ce serait pas d’envoyer

Tous ces connards

Sur Mars…

Mais j’ai des doutes…

Vraiment…

Dommage.

A.R. mars 2023

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Portraits

Gilbert Bécaud

Je suis dans le salon. Dans le salon, il y a la grande table en chêne, enfin je crois que c’est du chêne, j’adore cette table et les 8 chaises. Pendant les repas, quand il y a des invités on tire les rallonges, il faut faire attention de ne pas se coincer les doigts. C’est marrant j’ai l’impression qu’il y avait souvent des invités… Mais en fait, non, je ne crois pas. C’est juste qu’à chaque fois ça me marquait, alors dans mes souvenirs c’est resté, alors que les fois où on n’était que nous, ca fait comme si 100 repas étaient égal à un… puisqu’ils étaient presque tous pareils. Ce n’est pas grave. Je me rappelle, quand il y avait des invités j’adorais, vers la fin du repas, quand on avait fini de manger, et que les adultes restaient à table pour discuter, j’adorais me glisser sous la table et jouer au milieu des pieds des adultes. Alors ce plaisir je l’ai associé à cette table. Juste en voyant la table je me retrouvais instantanément en dessous, comme un jour de fête, simplement en la regardant.

Voilà, je suis dans le salon, il y a la table et il y a le tournedisque. C’était le tournedisque de ma soeur. A l’époque on ne disait pas platine vinyl, éventuellement platine disque, mais on disait surtout tournedisque. Ma soeur n’était plus à la maison, mais son tournedisque si ! Elle vivait maintenant en couple et son compagnon avait un bien plus joli tournedisque que nous. Alors, nous, on avait gardé son tournedisque. Et désormais il n’était plus dans sa chambre, mais dans le salon.

C’est drôle je me rappelle bien de cette maison, on y est resté même pas un an… Moi j’ai l’impression qu’on y est resté des années… J’étais en CP, j’apprenais à lire (j’avais du mal, les p, les b, les d, les t… pfff c’était trop trop dur) et donc j’ai l’impression qu’à ce moment précis j’étais souvent tout seul à la maison. Car je me rappelle avoir été très souvent dans le salon pour écouter des disques que je mettais tout seul sur la platine, euh, le tournedisque. Et mon préféré c’était Gilbert Bécaud.

Et chez Gilbert Bécaud, ma préférée c’était le Petit oiseau de toutes les couleurs. Je mettais cette chanson et je courais partout. J’étais dans la chanson. Il fallait absolument absolument que j’attrape ce petit oiseau. Je courais dans tous les sens, comme Bécaud dans la chanson… Et c’est terrible parce qu’à la fin de la chanson, il ne réussit pas à l’avoir ce petit oiseau. Non, le petit oiseau il s’envole très loin, il part traverser l’océan et c’est pour ça qu’on ne pouvait plus le poursuivre avec Bécaud, parce qu’on ne savait pas nager (en tout cas pas moi) et il n’y avait pas de bateau dans la chanson. Donc, le petit oiseau, il partait pour toujours. L’avantage c’est que moi je pouvais remettre la chanson et recommencer.

C’est certainement quelque chose qui est resté très ancré en moi. Cette identification très forte, cette catharsis. Le sentiment que ce que vit l’artiste je le partage, je le vis aussi. Bécaud, son interprétation c’était ça. Il vivait la chanson, comme dans l’Orange ou dans le Marché. Il va faire ses courses, on est avec lui. Et puis quand il est tout seul sur son étoile, on est tout seul nous aussi. Quand Jules joue du violon, c’est dingue, on est à la fête avec tout le village. Rosy and John, quelle aventure ces deux-là. Les cerisiers qui sont blancs, avec toutes les fleurs, et dans cette chanson, moi j’étais Paul, mais c’était terrible, parce que Paul dans la chanson il doit partir jouer, alors qu’il se passe des trucs terribles avec la cousine… L’horreur ! Bécaud c’était un spectacle pour moi tout seul dans le salon.

Je crois qu’il m’a le premier transmis cet amour de partager des émotions avec quelqu’un d’autres. Le fait de vivre ensemble un même sentiment. Gilbert Bécaud c’est un pilier. C’est une sorte de phare dans ma vie, qui m’éclaire et me donne une direction : partager c’est vivre.

A.R. le 5/11/2023

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Rime en Vrac

Partie remise

J’ai sauvegardé la partie
Tout c’qu’on a fait jusqu’ici c’était trop bien
Ne plus rien perdre de cette vie
On sait jamais comment sera demain

Faut dire qu’avec ce qui nous entoure
On a beau faire, c’est pas gagné
Les tuiles tombent par panier
On ruse pour échapper aux entour-
loupes de ceux qui veulent tout
De ceux veules et lourds
qui raclent jusqu’aux pourtours
et n’ont jamais assez tou-
jours à rogner jusqu’à l’os
les plus meurtris, les plus pauvres
et leurs coeurs jamais n’ouvrent
Comment faire tomber ces colosses ?

Alors pourquoi sauvegarder une partie
Surtout si elle est si pourrie
Recommencer du début,
Et mettre tout cela au rebut.

Yeap ! Mais y’avait quand même du très bon
Des belles personnes, des beaux moments
On était heureux comme des gibons,
A qui on aurait dressé un monument.
De toutes façons il semblerait
Que la partie soit game over
Après les DVD et les blu-rays
vont disparaître le sperme et les ovaires…
On a p’têt’re un peu trop rigolé
Joué les zozos et les gros niais
On vient de se faire gauler
A fout’ le feu à tout l’grenier !

On a beau sauvegardé la partie
Y’à plus grand monde pour jouer
Appuyer sur la manette, remuer la souris
Salut les ami.e.s, Zelda, Mario, Luigi !

A.R. – 28/02/23